mercredi, mars 23, 2005

Le rendez-vous africain

C'est une histoire qui débute avec une invitation. C'est une histoire qui s'apparente au "plan foireux thaïlandais" que j'ai connu en ce début 2005.

Il y a un grand mariage dans un village djerma. Un fils de Kountché se marie. Le chef du village de Damana est le grand frère du Général Seyni Kountché, un ex-président du Niger, monté au pouvoir par coup d'état, décédé en 1987 d'une maladie quelconque. Il adonne qu'Isak, un citadin de Niamey et membre de notre entourage, est aussi un fils de ce chef.

"Rdv à 19 à la station de Balleyara", nous écrit Isak par SMS. Il nous arrangeait un lift à partir de Balleyara, ~90km de Niamey, pour se rendre à Damana, ~15km plus loin. Tout s'arrange le vendredi même de notre départ. On avait demandé un lift à notre patron qui vit à Balleyara et qui s'y rend toutes les fins de semaine. Une centaine de kilomètre ne semble pas tant par chez nous... ici, la distance a une toute autre signification. À 17h00, Sara et moi étions encore au service (boulot) en train d'attendre patiemment après un lift qui n'arrivait pas. Ça prenait au moins 2h de route et plus le temps coulait, plus notre rendez-vous devenait "africain". Sara eut alors une brillante intuition. Pourquoi ne pas essayer le taxi-brousse? Badio, un collègue de travail nous propose de nous trouver un transport pendant que nous préparons nos bagages pour la fin de semaine. Nous retournons chez nous et croisons justement un taxi-brousse, cap vers Balleyara probablement. À peine arrivé chez nous que quelqu'un cogne à la porte, c'était Badio et le même véhicule qui a rebroussé chemin pour ramasser deux passagers! C'était un ami à lui qui nous rendait service! Comme tout le monde a l'air de se connaître ici! 1500 francs CFA chaque, guitare et bagage à bord, nous filons dans la petite van, communement appelée 18-places, vers notre destination. 19h15, nous débarquons à la station d'essence de Balleyara, embarquons dans notre lift pour Damana, et savourons la première Flag bien froide de la fin de semaine!

Nous ne savions pas en ce moment précis, que la Toyota du service avait eu une crevaison et que le patron arriverait à 23h00 à Balleyara!


Damana
Nous arrivons à Damana vers 20h, après une belle aventure en taxi-brousse. Ai-je déjà mentionnéque les salutations font partie d'un protocole très important? Nous passons alors par la chefferie pour saluer le père d'Isak. C'était un vieux djerma d'environ 80 années, resté imposant dans un aura d'importance. Régnait un petit atmosphère de respect mélangé au malaise, de peur d'offusquer l'ancêtre par un faux pas. Quelques minutes après, on nous présente notre case de passage, une ancienne villa du Général Kountché lui-même! À peine avons nous déposé nos bagages que des femmes nous apportait un copieux repas de patates douces à la sauce avec viande de mouton. J'ai du faire quelques tests d'allergie, de peur qu'ils emploient l'huile d'arachide. Laissez-moi vous dire que j'ai mangé comme un porc quand le test a été passé avec succès!

Le reste de la fin de semaine se résume en repos sur une natte, que l'on déplaçait en fonction de l'ombre créée par les eucalyptus. Un peu de guitare par-ci, un peu de djembé par-là, des petits jams sessions, poser le thé, des salutations à ne plus finir, une fin de semaine bien arrosée par les Flags, le gin et du vin quoi!

Nous nous sommes promenés à travers le village pour apercevoir des différentes concessions, le centre social avec la seule TV du village (sur laquelle passait un long métrage de l'agent 007), l'école, les jardins. Le samedi soir venu, juste avant le tomber du soleil, nous avions planifié aller prendre une flag sur la dune de Damana, à quelques kilomètres à pied du village. Quelle vue incroyable nous était offerte! D'un côté de la dune, panorama du village entier, et de l'autre côté, panorama du paysage sahélien typique.


Périple Toyota en brousse
Alphonse "la défonce", un cousin à Isak s'est aventuré dans le terrain broussailleux pour nous apporter le cooler plein de bières froides aux dunes dans sa Corolla! Même avec un habitué de la conduite en brousse, nous n'avons pas pu nous tirer d'une belle péripétie de conduite en brousse! Comme nous n'avions plus que la lueur de la lune et des phares de la voiture, nous avions un peu de misère à ramener la Toyota au village! Zig zag entre les arbustes, pris dans le sable à plusieurs reprises, même ne plus savoir par ou passer tellement il y avait de cul-de-sac.
Finalement, Isak et cie ont couru à travers la brousse, comme des "Peuls derrière leur taureau", pour venir à notre rescousse et nous diriger à travers la brousse.



Le mariage djerma
Le marié offre 3 pagnes (unité de mesure ainsi que mot pour désigner un morceau de tissu), divisé pour donner un petit morceau à chaque personne impliquée dans le mariage. Ces gens s'achetent alors leurs pagnes selon le motif du morceau reçu et se crééent leur propre morceau de vêtement qui forme alors, l'uniforme de mariage. Plus les gens ont le même motif sur leur habits, plus le mariage est bien organisé.

Premièrement, tout le village est impliqué, en fête! Il y a des griots (musiciens, poêtes, dépositaires de la culture orale) qui jouent de leur tambours toute la journée, en demandant de l'argent aux passants, puisent leur énergie en croquant des noix de kola (alcaloïde, hallucinogène faible, donnant un peu le même effet que le café). Des femmes dansent au son de la musique. Nous, les invités, suivont l'action de loin, de peur de trop capter l'attention, étant vraiment les seuls blancs au village. Il y a un tambour traditionnel qui tonne toute la journée devant la concession de la mariée. L'industrie de la bouffe fonctionne toute la journée pour satisfaire l'appétit de tous les invités.

La fête du mariage dans le jour se passe dans deux camps, celui de la mariée et celui du marié. La nuit du mariage, les mariés se retrouvent chez le marié pour célébrer leur première nuit de mariage, pour travailler sur un premier projet futur, et ce jusqu'à 6h le matin! Disons qu'il était mode zombie le lendemain quand nous l'avons salué avant de quitter...


Eau, source de vie
Pressés par le départ improvisé, nous n'avions amené que deux gourdes d'eau de robinet. Le niveau d'hydratation du corps fluctue énormement dans ce climat sahélien, surtout en brousse! Pas le choix, nous n'avions que l'eau du puits, pleine de minéraux quelconques, pour se désaltérer et pour se doucher. Il faut croire que mon système est devenu dur comme fer, car chicago n'a pas eu lieu depuis!


Le marché de Balleyara
Dimanche après-midi, déposés à Balleyara, deux blancs partent à la recherche de la concession de Boureïma, le patron, sous le soleil plombant. Ayant déja visité sa concession deux fois, Sara a pu nous mener sans trop se perdre à destination, en demandant à quelques gens au passage (tout le monde se connaît dans un village). Arrivés chez lui, nous été reçu par sa femme qui nous a offert eau fraîche et repas, ainsi qu'une douche d'eau de puits tellement rafraîchissante!
Son neveu Saddam (aucun rapport avec l'illustre personnage), âgé de 14 ans, se propose comme notre guide pour le marché de Balleyara. Après la période de grande chaleur de la journée, donc vers 15h00, nous nous dirigeons vers le marché, en savourant un Fanta bien froid au passage, qui était comme un oasis en plein désert!


Le marché de Balleyara attire des commerçants de tous les villages avoisinants. Nous nous sommes perdus à travers des couloirs étroits entre les innombrables kiosques vendant des articles de toute sorte. Calebasses (grands bols fabriqués avec des courges), tapis, pagnes, kola, cordes, etc. Saddam nous a mené le chemin à travers tout le bazaar pour nous montrer le fameux marché de bétail. Hallucinant! On y négocie des moutons, chèvres, vaches et même dromadaires! Combien ça vaut un dromadaire? 250000 francs CFA (~600 CAD)! Qui veut un chameau? En tout cas il y en a pour tout le monde!

À la fin de la journée, il fallait songer à rentrer au bercail. Trouver un transport fut une autre aventure joyeuse... Dans le milieu de l'autogare, grouillait une foule de petits enfants mendiant à manger (école coranique), vendant de l'eau fraîche(hari eno!!!). Et pour l'heure de départ? Ben quand le véhicule se remplit... vaut mieux prendre un 7-places qu'un 18-places dans ce cas là!
PrésentDéjà un mois est passé depuis mon arrivée le 23 février! En ce moment, la population fait "ville morte" (personne ne sort de chez soi) une fois par semaine, pour montrer leur désaccord face à la décision du gouvernement d'augmenter le prix d'éléments essentiels, soit le pain, le lait, l'électricité déjà trop chère. Ce qui nous donne quelques jours de congés qui nous permettrons d'aller aux dunes de Niamey en fin de semaine et de se baigner à la piscine de ma tanti Marie-Julie...



Photos
L'intérieur d'un 18-places (je suis dans le coin en bas a gauche!) ©Sara 2005
Aria, un Bob Marley réincarné ©Sara 2005
Le bureau des volontaires
Un chameau particulièrement branché ©Sara 2005
Des chameaux qui prennent ça chill au marché ©Sara 2005
Un pano du village de Damana ©Sara 2005
Un pano derriere la dune de Damana ©Sara 2005
Un griot au marché faisant son show ©Sara 2005
Un petit show de guitare à Damana ©Sara 2005
Le manguier, source de mon fruit de l'année
Le marché de bétail à Balleyara ©Sara 2005
La pépinière de Gnagoumaré
Les compagnons de travail à l'ONPHDB
Ma chambre
Torro! ©Sara 2005
Transport Niger ©Sara 2005

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